27 août 2018

SONGE À LA DOUCEUR, CLEMENTINE BEAUVAIS



« Je m'en fout que ça te fasse rire, tu sais, de nous deux je suis le seul à avoir vu la verité en face, je suis le seul a ne pas mettre fais une carapace, pas parce que j'étais inconscient, non,mais parce que j'étais vivant à l'époque j'étais vivant, j'étais léger,fragile peut-etre, mais libre- et ta cuirasse Eugène,un jour tu t'affaisseras dedans, Tu creveras dedans »

Un roman à la fois ordinaire et original, qui intrigue notamment grâce à sa forme en vers libre. Une forme qui, à mon sens, à été difficile à suivre et à laquelle il est difficile de s’habituer. Les deux protagonistes paraissent bien fades face au deux personnages secondaires qui m’ont, eux en revanche, parût bien plus intéressants.







Quand Tatiana rencontre Eugène, elle a 14 ans, il en a 17 ; c’est l’été, et il n’a rien d’autre à faire que de lui parler. Il est sûr de lui, charmant, et plein d’ennui, et elle timide, idéaliste et romantique. Inévitablement, elle tombe amoureuse de lui, et lui, semblerait-il… aussi. Alors elle lui écrit une lettre ; il la rejette, pour de mauvaises raisons peut-être. Et puis un drame les sépare pour de bon. Dix ans plus tard, ils se retrouvent par hasard. Tatiana s’est affirmée, elle est mûre et confiante ; Eugène s’aperçoit, maintenant, qu’il la lui faut absolument. Mais est-ce qu’elle veut encore de lui ? Songe à la douceur , c’est l’histoire de ces deux histoires d’un amour absolu et déphasé – l’un adolescent, l’autre jeune adulte – et de ce que dix ans à ce moment-là d’une vie peuvent changer. Une double histoire d’amour inspirée des deux Eugène Onéguine de Pouchkine et de Tchaikovsky – et donc écrite en vers, pour en garder la poésie. 

Bon, j’ai bien conscience que ce n’est pas ici que vous allez faire une découverte. « Songe à la douceur » est un livre qui a eu beaucoup de succès récemment, on le voit partout. Ce livre nous interpelle et nous intrigue, si ce n’est par l’histoire même du roman, ce sera par sa forme originale.  Le tout réside dans la forme du roman, en effet, le livre est écrit en vers. « En vers » vous dîtes ? La mise en page est certes sympathique et hors du commun, mais on peut rapidement se trouver déconcerté par ce style pour le moins atypique.   

L’histoire en elle même ne casse pas trois pattes à un canard (oups vous m’excuserez cette expression…). Une histoire d’amour comme on peut souvent en voir. Deux protagonistes, Eugène et Tatiana, qui se sont connus adolescents lors des vacances d’été. Sans grande surprise, cela restera l’histoire d’un été car ils se perdent de vue et ne se retrouvent que des années plus tard dans le métro. Tatiana a grandi, évolué, elle est devenue « quelqu’un », une jeune femme en pleine rédaction de sa thèse. Eugène, quant à lui, est à présent salarié.  

« On se croit mûr, on est sûr de ne pas se tromper parce qu'on plante son futur dans une terre sèche entre des billes d'argile pour qu'il ne pousse pas trop beau et trop facile, qu'est-ce que j'étais con ! qu'est-ce qu'il avait raison, qu'est-ce qu'ils ont essayé de me rendre mieux. J'avais 17 ans ! d'où me venait ce sérieux ? D'où me venaient - d'où me venaient ces grands principes ? Qu'est-ce qui m'empêchait de me pencher sur Tatiana pour l'embrasser, j'aurais sûrement adoré ces lèvres. »


La lecture du roman est ponctué par des flash back et c’est cela qui rend la lecture intéressante à mon sens. Sans ces petits retours vers le passé, l’histoire resterait bien fade et sans grand intérêt. Adolescent, Tatiana reste une jeune fille qui préfère garder son nez dans des romans d’amour plutôt que de se confronter aux autres, Eugène lui, est un jeune homme bien dans sa peau, qui repoussera cette dernière quand elle tombera amoureuse de lui. C’est simple, sans complications. Des années plus tard, les rôles se sont en quelques sortes inversés. La jeune et fragile Tatiana est à présent une femme en plein réussite, qui se fait une petite place dans le monde du travail. Eugène, de son côté, donne tout l’air de n’avoir rien accompli d’extraordinaire. Ce retournement de situation est assez intriguant. On suit donc les deux jeunes gens, à deux moments de leur vie.  

Ne pas croire que toute l’histoire est centrée sur ces deux personnages, deux autres protagonistes, un en particulier, surgissent également dans le récit. Tout un mystère sera porté sur l’un deux. Et malgré, qu’il ne soit qu’un personnage secondaire, j’ai (et de loin) préféré le profil de Lensky. Son côté rêveur, idéaliste, passionné, m’a complètement charmé. Tatiana et Eugène paraissent bien fade à côté, et c’est certainement l’effet voulu.  

« J'aimais tout le monde, hier encore, hier j'avais seulement de l'amour dans la tête, j'avais l'existence belle, vous me l'avez rendue bête »

Place à la forme à présent. Je sais que beaucoup ont apprécié ce roman pour le style poétique et original qui s’en dégage. J’ai moi même été attirée avant tout par cet aspect. Et que dire ? Alors, certes, c’est amusant, donne du charme à l’histoire mais contrairement à beaucoup, je n’ai pas su accrocher à cette forme. Il faut clairement s’y habituer, j’ai de nombreuses fois été interrompue tant la lecture ne me paraissait pas naturelle. Ça part dans tous les sens, à droite à gauche, de travers. J’ai eu la nette impression que ma lecture était souvent hachée. On s’habitue à la forme au bout de quelques minutes, mais cela demande tout de même un effort aux yeux et au bout d’un court moment, j’étais fatiguée d’être autant concentrée sur ma lecture.   

« D'un coup , D'un coup, D'un coup elle s'est cassée, ma jeunesse elle qui etait dorée comme toutes jeunesse doit l'etre, elle qui n'avait raison d'etre qu'Olga , la poesie et toi, et le soleil et les spliffs sur ce toit. Qu'est ce qui se passera demain? qu'est ce que je vais faire, quand je me reveillerai sans ma jeunesse , avec dix mille ans de plus, et pas plus d'experience - d'intelligence parce que l'ennui c'est pas une sagesse, la tristesse c'est pas un projet educatif... »

Un aspect du roman qui m’a beaucoup plu en revanche : le point de vue narratif omniscient. Lors de la lecture, cela nous donne l’impression que le narrateur fait parti intégrante de l’histoire, qu’il pourrait être un des personnages du roman. Il est amusant de remarquer quelques conversations échangées entre le narrateur et les personnages, parfois pour les sermonner, les interroger, leur faire prendre conscience de certains faits…  

Vous le remarquerez donc, je n’ai pas été aussi emballée que certains quant à cette lecture. Les personnages principaux m’ont paru bien fades, l’histoire est basique et sans grande surprise, et la forme du roman quelque peu dérangeante et désagréable par moment, même si je lui ai trouvé un charme quelques fois. Ce n’est pas forcément une déception, ce en partie grâce au mystère qui tourne autour d’un personnage secondaire, aux flash back qui m’ont interpellé. Je pense donc simplement être passée à côté de cette histoire, peut être que je n’ai pas su l’apprécier comme il l’aurait fallut.

240 PAGES — AOUT 2016 — EDITIONS SARBACANE

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